Depuis l’annonce de la Garde des Sceaux Nicole Belloubet le 15 mars dernier, les tribunaux se sont eux aussi mis en confinement, fermant leurs portes au public, avec des conséquences considérables sur le fonctionnement de la justice.
Les audiences publiques sont suspendues, les procès d’assises sont repoussés, seuls les contentieux « essentiels » sont épargnés, pour limiter au strict minimum l’activité judiciaire.
Les conséquences judiciaires et administratives du contexte pandémique actuel vont bien au-delà des tribunaux : tous les acteurs du monde judiciaire sont soumis aux mesures de confinement, et voient leur activité largement diminuer voire s’arrêter.
Aujourd’hui nous vous parlons des conséquences du coronavirus sur l’activité des huissiers.
La continuité de leur mission de service public :
Bien que non accessibles du fait des mesures de confinement, les offices des Huissiers de justice restent ouverts pour permettre la continuité de leur mission de service public.
Comme toutes les professions, les Huissiers s’adaptent, mettant en place les mesures nécessaires pour protéger les salariés, comme le télétravail, et subissent une baisse d’activité.
Pour autant, la plupart de leurs missions peuvent être accomplie, avec les aménagements que le contexte implique.
Les constats :
Le constat d’huissier permet de se constituer une preuve qui fera foi auprès des tribunaux ou des compagnies d’assurances. Il est parfois nécessaire que cette preuve soit constitué rapidement, lorsque qu’il s’agit par exemple de constater un sinistre.
Certaines situations urgentes ne sauraient en effet attendre la fin du confinement pour l’intervention d’un Huissier : dégâts des eaux, incendies, atteintes au droit de propriété… Cela alors d’établir la preuve immédiate d’un éventuel préjudice, permettant d’introduire une action après le confinement.
Si certains constats peuvent être fait à distance, comme les constats en ligne, de site internet, pour les autres, l’Huissier devra se déplacer après avoir mis en œuvre les précautions nécessaires.
D’abords en limitant voire en supprimant la présence des tiers sur le lieu d’intervention de l’Huissier. Il va alors recueillir les informations les plus exhaustives et précises possible pour lui permettre d’accomplir seul sa mission.
Lorsque la présence de tiers sera nécessaire, il faudra alors assurer le respect des précautions et gestes barrières permettant la sécurité de chacun : la distanciation sociale, le port de gants et de masques si cela est possible.
Les mesures d’exécutions forcées :
Les mesures d’exécution forcées, comme les autres missions des Huissiers de justices, restent permises par la règlementation en vigueur, la loi du 23 mars 2020, qui instaure l’état d’urgence sanitaire, n’y faisant pas obstacle.
Pour autant, la Chambre Nationale des Commissaires de Justice préconise de reporter, dans la mesure du possible, toutes les procédures d’exécution forcées en privilégiant les communications à distances.
L’ensemble de la profession a décidé de suspendre ces opérations, et de stopper notamment toute mesure de recouvrement amiable et judicaire, afin de protéger les entreprises.
L’ensemble des délais en matière de procédures civiles d’exécution ont été prorogés, à l’exception de la procédure de saisie immobilière qui fait l’objet d’un régime distinct.
Concernant les expulsions, la trêve hivernale a été reportée au 31 mai 2020, sauf exceptions (relogement de la famille ou si les logements font l’objet d’un arrêté de péril).
Les significations :
Comme tout acte nécessitant le déplacement de l’huissier au domicile de la personne, les significations sont très largement compliquées par les mesures de confinement.
L’ordonnance 2020-306 du 25 mars complétée par la circulaire du 26 mars 2020 (circ. n° CIV/01/20 du 26 mars 2020, d’application immédiate), prise en application de la loi du 23 mars, a permis d’adapter les délais relatifs aux actes en matière civile ou commerciale permettant d’éviter les conséquences préjudiciables de la suspension des mesures d’exécution.
L’ensemble des délais d’actions et délais de procédures échus (délais pour exercer une voie de recours, délai de forclusion, délai de péremption…) ont ainsi été prorogés.
Toutes les actions en justice, les actes procéduraux, les formalités, les inscriptions… qui devaient être réalisés au cours de cette période, voient leurs délais prorogés à l’issue de la période d’urgence sanitaire pour le délai initialement prévu par les textes.
Les nouvelles solutions proposées par les huissiers
L’activité des huissiers de justice se poursuit, et de nouvelles solutions se développent pour d’assurer cette continuité.
La système SECURACT permet depuis 2012 aux Huissiers de justice de signifier des actes par voie électronique. Mais si la plateforme était jusqu’à lors réservée aux échanges avec les professionnels et l’Etat, toute personne pourra désormais se voir délivrer un acte par voie électronique (Chambre nationale des commissaires de justice, 30 mars 2020).
Avec le consentement du justiciable, celui-ci pourra donc se voir signifier un acte par voie électronique, qui sera déposé dans un coffre-fort électronique.
En cas de refus, la signification pourra soit être reportée, soit réalisée après la mise en place d’un certain nombre de précaution permettant une signification « sans contact ».
Avec d’autres solutions développées par les Huissiers telle que Delivract, l’ensemble de la procédure peut donc être dématérialisée et se dérouler en toute sécurité.
Cela vous permet, à vous avocats, d’adresser gratuitement, et de manière dématérialisée, tous vos actes à signifier à la plateforme Delivract pour trouver rapidement un huissier compétent sur la commune où se trouvent le(s) destinataire(s) de vos actes.
Les échanges sont dématérialisés et la plateforme vous permet de suivre en temps réel vos mandats de signification.
En ces temps de confinement, cela permet aux huissiers d’assurer la continuité de la mission de service qui est la leur et vous permet, avocats, de poursuivre votre activité en limitant l’impact des mesures gouvernementales actuelles.
Questions à Jean-Philippe Bouvet, Huissier de Justice
Quels sont les cas d’urgences, ou le recours à l’Huissier est un impératif, malgré le contexte actuel et les prorogations mise en place ?
Il est des situations qui ne peuvent souffrir d’une « prorogation ». Exécuter une ordonnance de protection à l’encontre d’un conjoint violent, faire procéder à la délivrance d’un congé, régulariser une assignation pour une audience de référé, sont autant de procédures que nous continuons à connaitre dans nos offices, étant précisé que cette activité apparait extrêmement réduite.
Nos offices continuent toutefois d’être sollicités pour la régularisation de constatations, les situations rencontrées par les justiciables nécessitant très souvent une intervention urgente en raison de l’aspect provisoire du trouble à constater.
En tant qu’huissier, vous êtes vous-même fortement impacté par le contexte pandémique actuelle, quelles sont les conséquences concrètes sur votre activité ?
Nos offices ont reçu, dès les premiers instants de cette crise, des instructions émanant de l’ensemble des donneurs d’ordre et tendant à la suspension sans délai de l’ensemble de nos actions.
A cet arrêt immédiat de l’activité de recouvrement judiciaire, s’est ajouté la réduction de nos missions de significations en raison de l’impact des mesures sanitaires sur l’activité des juridictions, ces dernières réduisant le contentieux traité aux affaires dites « essentiels ».
Nous relevons dès lors une baisse inédite comprise entre 70 et 90% de l’activité habituelle de nos offices.
Votre plateforme a été créée pour les Avocats, juristes ou autres acteurs du monde judiciaire, comment les accompagnez-vous pendant cette période de confinement ?
Cette période de confinement engendre nécessairement des adaptations dans le délai de traitement des demandes reçues, mais nous garantissons aux avocats utilisant Delivract le maintien de nos services, en demeurant attentif et disponible pour toutes les demandes urgentes.